« Je suis un jeune volontaire. Je ne peux pas voir une partie de mon pays sous contrôle de +criminels+ et ne pas aller combattre! », déclare Oumar Touré, en référence aux groupes armés dominés par des islamistes qui ont pris le contrôle du vaste Nord entre fin mars et début avril, après deux mois et demi d’attaques contre l’armée.
« Mohamed Ali », un autre « volontaire » surnommé d’après le boxeur américain à cause de son physique impressionnant, bombe le torse et se dit prêt à « faire à la guerre aux ennemis du Mali ».
Au total, ils sont 285 jeunes, dont une trentaine de mineurs mais aucune femme, rassemblés sur un grand terrain nu à Soufouroulaye, une localité à une trentaine de kilomètres au sud-est de la ville Mopti.
Ils sont chômeurs, lycéens, étudiants ou fonctionnaires déplacés des zones sous contrôle des islamistes. Certains sont sympathisants ou membres du mouvement d’auto-défense « Ganda Iso », « Le fils du terroir » en langue songhoï parlée majoritairement dans le Nord.
« Un! Deux! Trois! », hurlent-ils en choeur en entamant un exercice de mise en forme. Chacun tente de monter son genou droit vers son menton. Tous sont en tenue civile, certains portent des chaussures en plastique, d’autres sont pieds nus. L’ambiance est plutôt bon enfant.
« On appelle ce camp +la base militaire+. Je suis +le contrôleur général+. J’encadre ces jeunes », explique Oumar Maïga, un militaire de l’armée régulière malienne qui fait office d’instructeur, alors qu’officiellement l’Etat malien ne reconnaît pas ces milices.
« Contribution à la guerre »
D’après Oumar Maïga, muet sur son grade, la formation se déroule en plusieurs phases: « formation morale pour que les jeunes soient aguerris, formation physique, et formation militaire avec exercices tactiques et de tirs ».
Les aspirants à la guerre contre les islamistes « sont disciplinés », soutient-il fièrement. Pour en donner une illustration, il pousse un cri strident et aussitôt les jeunes forment trois figures, un cercle, un triangle et un rectangle.
Les jeunes ont aussi des séances d’apprentissage de tirs à l’arme, une Kalachnikov. Un jeune, gaucher, s’y essaie, tire mais le coup ne part pas. Son arme n’était pas chargée. « Si tu étais devant l’ennemi, tu serais mort », lui dit l’instructeur avant qu’une averse n’interrompe les cours.
En attendant de pouvoir reprendre position sur leur terrain d’entraînement, ils se regroupent dans un hangar qui fait office de cuisine. Leur repas, du riz avec de la sauce cuit dans deux grosses marmites, est préparé par des femmes, elles aussi « volontaires ».
« C’est notre contribution à la guerre. Il faut aider et encourager ces jeunes qui font la fierté de notre pays. Ici, des sympathisants donnent un peu de nourriture pour ces jeunes, d’autres un peu d’argent. Nous, nous participons aussi », affirme une des cuisinières, Awa Samaké, ménagère à Soufouroulaye.
D’autres « volontaires » pour le Nord suivent un entraînement similaire sur un autre site dans la région de Mopti et dans un quartier dans le sud-est de Bamako où ils sont encadrés par d’anciens militaires, d’après une source sécuritaire malienne.
Même s’ils ne sont pas officiellement reconnus, ces miliciens semblent tolérés par les autorités.
Ce « ne sont pas des troupes militaires mais actuellement tous ceux qui veulent défendre la patrie sont les bienvenus », a déclaré une source militaire sous couvert d’anonymat interrogée à Mopti. Pour cette source, ces « volontaires » pour le combat pourraient venir en supplément aux forces maliennes en cas de besoin, voire être intégrés en partie dans l’armée.
Source : AFP