Un avion parmi la dizaine affrétés par l’Organisation internationale des migrations (OIM) a décollé le matin de l’aéroport international de Khartoum pour Juba avec 160 Sud-Soudanais à bord. Un second vol à destination de la capitale du Soudan du Sud pourrait suivre dans l’après-midi.
Environ 400 réfugiés avaient quitté samedi leur camp de fortune à Kosti, à 300 km au sud-est de Khartoum, pour gagner en bus l’aéroport, où une banderole accrochée par les autorités leur souhaite bon voyage.
Le plan d’évacuation établi par l’OIM prévoyait initialement six vols quotidiens, a expliqué Jill Helke, qui dirige l’organisation au Soudan. Si ce rythme est atteint, le rapatriement devrait prendre deux semaines.
Il s’agit de rapatrier les 12.000 à 15.000 Sud-Soudanais qui vivaient depuis des mois dans une grande précarité dans le port de Kosti, où ils dépendaient de l’aide internationale.
Estimant que ces migrants constituaient une menace pour la sécurité, les autorités locales leur avaient donné jusqu’au 5 mai pour quitter les lieux. L’ultimatum a été repoussé au 20 mai puis supprimé après l’annonce des plans d’évacuation par l’OIM.
Cette opération a lieu alors que les tensions entre le Soudan et le Soudan du Sud ont atteint leur paroxysme en avril, avec des combats sanglants à la frontière, les deux pays ne parvenant pas à résoudre des questions clés comme le tracé de la frontière et le partage des revenus pétroliers.
“C’est la première fois que je me rends dans le Sud. Je suis née ici”, a déclaré Cecilia Peter, 27 ans, en faisant la queue avec ses cinq jeunes enfants pour retirer sa carte d’embarquement. Elle a passé 13 mois avec sa famille à Kosti, après avoir perdu son emploi d’enseignante.
Tous les fonctionnaires originaires du Sud ont été renvoyés de l’administration civile du Nord juste avant l’indépendance du Soudan du Sud, proclamée en juillet 2011 au terme d’un accord de paix qui a mis fin en 2005 à 21 ans d’une guerre civile qui a fait deux millions de morts.
Le conflit avait aussi poussé un nombre similaire de Sudistes à fuir au Nord, jusqu’à ce que la partition n’incite des centaines de milliers d’entre eux à rentrer chez eux.
Mais l’installation au Soudan du Sud, l’un des pays les plus pauvres du monde, reste difficile. Le mari de Cecilia Peter a ainsi choisi de faire le trajet en camion jusqu’à la frontière, afin de transporter un maximum de bagages.
Adelino Jovida, 31 ans, a lui aussi perdu son emploi de policier et a passé 11 mois à Kosti. Il était venu dans le Nord en 1983, à l’âge de l’enfant qu’il tient sur les genoux. Avec sa femme et leur autre enfant, ils attendaient au terminal utilisé habituellement par les pèlerins se rendant à la Mecque.
“Je suis content de pouvoir revoir ma famille”, a-t-il déclaré, l’air grave, avant de s’envoler pour le Sud où il n’avait plus remis les pieds.
L’ambassadeur sud-soudanais à Khartoum, Kau Nak, a accompagné les voyageurs jusqu’à la porte de l’avion, les exhortant à ne pas diriger leur colère contre les citoyens soudanais, malgré “leur mauvaise expérience” dans le pays.
“Nous continuons d’être des voisins” et la “division de nature politique” ne doit pas éclipser les liens culturels et sociaux qui unissent les deux pays, a-t-il insisté.
Les Sud-Soudanais de Kosti font partie des quelque 350.000 Sud-Soudanais qui, selon leur ambassade, se trouvaient au Soudan au 8 avril, date limite fixée par Khartoum pour quitter le territoire ou régulariser leur situation.
L’OIM a assuré le rapatriement de quelque 23.000 Sud-Soudanais depuis juillet 2011.